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Laura RIZZERIO Croire et savoir au Moyen Âge

Date : 19.10.2016 — Audio 65 min.

Peut-on savoir réellement lorsqu'on croit ? Peut-on croire réellement si l'on sait ? Ces deux questions qui relèvent du quotidien et dont la réponse paraît simple, ouvrent en réalité des interrogations auxquelles il n'est pas si aisé de répondre. Et cela d'autant plus que l'articulation entre foi et raison pose problème aujourd'hui et que l'affirmation publique des convictions paraît menacer l'objectivité de nos connaissances et la stabilité de notre vivre ensemble. La philosophie, à différentes époques, a pourtant cultivé cette articulation et elle s'est enrichie en la pratiquant, surtout à l'époque médiévale. En reprenant la métaphore attribuée à Bernard de Chartres par Jean de Salisbury : « nani sumus gigantum humeris insidentes », les philosophes du Moyen Âge témoignent en effet que le savoir dont on jouit ne serait pas possible sans la confiance qu'on accorde aux « géants » de la tradition, dont les « épaules », utilisées comme assise, permettent de « voir plus loin » par rapport à ceux-là même qui nous soutiennent. L'historien de la philosophie Martin Grabmann, actif au début du XXe siècle, a montré que la pratique de cette articulation entre ratio et auctoritas fut à l'origine de la fécondité de la pensée médiévale, et qu'elle est au cœur de ce qu'il a appelé la « méthode scolastique ». En réinterrogeant les études de Martin Grabmann à propos de la méthode scolastique, ce cours souhaite d'une part mettre en évidence le fonctionnement de cette articulation entre savoir et croire, entre ratio et auctoritas, telle que les médiévaux l'ont pratiquée, et d'autre part vérifier si, aujourd'hui encore, l'exercice de cette articulation peut contribuer à la construction d'un vivre ensemble où les convictions, accueillies dans l'espace public et interrogées par la raison, pourraient valoir comme autant de traditions capables de nous conduire à « voir plus loin » que ceux qui nous ont précédés.

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