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Luc RICHIR Fonction symbolique et fonction poétique
de Marcel Mauss à Pierre Reverdy

Date : 20.04.2010 — Audio 72 min.

S’il est vrai que "personne n’a encore vu naître devant lui morale, dieux ou langage" (Benjamin Fondane), il n’en est pas moins vrai que nous voyons aujourd’hui disparaître ce qui supporte, depuis des millénaires, la fonction symbolique immanente à l’humanité. La pratique du don, "un des rocs humains sur lesquels sont bâties nos sociétés" (Marcel Mauss), consiste à établir une relation (ternaire) et non à conclure un échange (binaire): telle est la leçon de Marcel Mauss. Le don - la triple obligation de donner, de recevoir et de rendre -, met en acte la structure de la parole dans sa diachronie, c’est-à-dire dans sa responsabilité. Elle définit le sujet comme lié à la circulation de certains symboles (dépourvus de toute valeur mercantile) et non à la conscience de soi, à "l’impérialisme du Moi" (Levinas). En découvrant le concept de don, Mauss a su opposer à "la main invisible du marché", ainsi qu’au sujet transcendantal de la philosophie, un être relié à l’Autre et au monde.

Cette fonction de ligature est exprimée par le mot grec "symbole". D’où il résulte que l’action de symboliser consiste à établir des liens entre des termes que rien ne rapproche a priori, des "réalités distantes dont l’esprit seul a saisi les rapports". La fonction symbolique est, au sens plein du terme, fonction poétique, à condition de méditer la définition que Pierre Reverdy donne de l’image: "Elle ne peut naître d’une comparaison mais du rapprochement de deux réalités plus ou moins éloignées. Plus les rapports des deux réalités rapprochées seront lointains et justes, plus l’image sera forte - plus elle aura de puissance émotive et de réalité poétique."

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