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Tristan TRÉMEAU Les artistes sont-ils des agents doubles ?

Date : 04.12.2013 — Audio 115 min.

« Faites attention aux artistes, ils se mélangent à toutes les classes de la société et c'est pourquoi ils sont les plus dangereux », prévenait la Reine Victoria il y a un siècle et demi. À cette époque, les artistes modernes se reconnaissaient comme des « agents doubles » (Baudelaire), se déclarant parfois prêts au sacrifice révolutionnaire, épousant les revendications des classes populaires car proches de leurs conditions d'existence, tout en ayant pour clients la bourgeoisie, progressiste ou non.
Aujourd'hui, s'ils vivent toujours, en majorité, dans des conditions économiques et sociales précaires, proches de celles des classes populaires et des classes moyennes, les artistes contemporains, y compris ceux qui engagent leur travail sur des terrains politiques, ne semblent plus faire peur. Ainsi, selon Jean-Jacques Aillagon, ancien président du centre Georges Pompidou à Paris, ancien ministre français de la Culture et de la Communication et conseiller de François Pinault, « L’art est devenu, c’est l’un des grands effets de la démocratisation de la culture et de la sédimentation des actions publiques, un objet culturel qui participe singulièrement au développement de la société des loisirs dont il est parfois devenu un des pôles les plus attractifs ».
Comment comprendre cette évolution ? Le cours-conférence s'intéressera à des études de nouvelles formes d'action artistique dans l'espace public et les institutions artistiques (l'artiste comme médiateur) et à des études de cas de nouvelles manifestations initiées par les pouvoirs publics (Biennales, Nuits Blanches, Capitale Européenne de la Culture...) et de nouveaux établissements initiés par les élus et co-financés par le mécénat (maisons folies, projet de Tour Médicis en banlieue parisienne...). Une hypothèse sera centrale : les artistes, du fait de leur situation économique précaire, de leur « disponibilité contestaire » (Aillagon) et de leur capital symbolique reconnu par les élus et décideurs économiques, ne seraient-ils pas utilisés comme des agents doubles, pacificateurs sociaux, opérateurs de requalification et de gentrification des quartiers populaires, mais encore facteurs d'augmentation du capital touristique et marketing des villes ?

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